On s'interroge gravement, dans Le Monde et ailleurs, sur les effets de la dégradation de la note de la dette publique grecque par les agences de notation.
De cette notation, on ne peut pas dire grand chose, puisqu'elle consiste à appliquer des méthodes d'évaluation opaques à des comptes publics plus opaques encore, qui feraient passer ceux d'Enron pour un modèle de rigueur et de probité. Souvenons nous par exemple qu'il y a 3 ans, les Grecs ont décidé de devenir plus riches de 25% du jour au lendemain par la grâce d'un artifice comptable : intégrer une estimation de l'économie souterraine à leur PIB. Cette seule anecdote en dit long sur la valeur des comptes publics grecs. Comme Enron, il ne reste plus que la vérité du cash flow pour juger en ces circonstances : tant que l'Etat grec est à flot, c'est donc que tout va bien. Pour le reste, on ne sait pas tout simplement pas. Même si certains parviennent à se faire grassement rémunérer leur ignorance.
Ce qui est, par contre, sûr c'est que Le Monde a tort de verser, comme à son habitude, dans le registre tragique du déficit-qui-va-tous-nous-emporter-surtout-si-on-doit-payer-en-plus-pour-les-Grecs. Pour l'instant, tout cela est favorable à l'État français et à son endettement.
Pourquoi ? La raison est simple : il y a des liquidités en abondance sur les marchés financiers. Même si la peur n'est plus ce qu'elle était, la fuite vers la qualité n'a pas cessé : les investisseurs veulent du sûr. Et le sûr, cela reste la dette publique des États sérieux. Or la France est un État sérieux. C'est ainsi que le cours des obligations de l'État français a baissé nettement à l'automne dernier à mesure que les acteurs financiers vendaient des titres peu surs (privés) pour acheter des dettes publiques sûres, dont la française.
Le même mécanisme a lieu actuellement : plus la dette de la Grèce apparaît risquée (ainsi que celle de quelques autres pays), plus l'on s'en détourne, plus les investisseurs se dirigent vers ce qu'il y a de plus sûr : la dette d'États comme la France.
Les taux d'intérêt sur les obligations de l'Etat grec sont donc négativement corrélés avec ceux de la dette de l'Etat français.
Chose plus étonnante encore, la crise de confiance actuelle ne profite pas davantage à l'Allemagne qu'à la France. Généralement, dans ce genre de circonstances, l'Etat allemand est le grand gagnant : rien ne semble plus sûr que lui. Si on achète plus de dette française, on achète encore plus de l'allemande, et l'écart entre les deux taux d'intérêt grandit, l'un baissant plus que l'autre. C'est d'ailleurs ce qui s'est passé à partir de septembre de l'année dernière, jusqu'en janvier. Ici, rien de tel, les spreads ont même tendance à se réduire.
Les marchés financiers sont donc certains d'une chose : la France ne ferra pas faillite. Ce qui est une excellente nouvelle : nous allons pouvoir continuer à financer notre dette pour pas cher. Soyons optimiste : peut être même que cela permettra de convaincre que la France n'est pas près de faire faillite. Si les marchés financiers sont prêts à lui prêter pour le taux d'intérêt le plus faible depuis des décennies, c'est qu'ils doivent savoir ce qu'ils font - non ?
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mercredi 9 décembre 2009
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